« Groupe électrogène » est un projet de cinéma expérimental en plein air de l'école d'art e|m|a|fructidor, accompagné par la cellule metalu|net. Il comporte des phases d'expérimentation dans l'enceinte de l'école et en extérieur, qui doivent aboutir à une série de réalisations concrètes : conception et construction des éléments d'un dispositif de projection mobile, documentation et mise à disposition de ces constructions sous licence libre, performances en public.


Depuis son invention au début du 20e siècle, le cinéma est devenu une industrie ayant établi des normes tant dans le tournage, le montage, ou la conception des films que dans leur exploitation et leur diffusion. À la marge du cinéma conventionnel, de nombreux artistes ont toujours cherché à déjouer ces usages imposés par une logique d'exploitation à grande échelle, et se sont émancipés de la salle de cinéma et du cérémonial qui l'accompagne. En suivant les traces laissées par les pionniers du cinéma underground américain et de l'expanded cinema, et en s'inspirant de la joyeuse liberté de cette communauté vis-à-vis des normes imposées par un cinéma qui est désormais devenu une vaste entreprise culturelle, il s'agirait ici de faire du cinéma « sauvage » comme on fait du camping sauvage. C'est-à-dire en investissant le temps d'une soirée ou d'une nuit des lieux urbains ou naturels loin des zones habitées (friches, ports, cascades, clairières, ... ) et en tirant parti à chaque fois du lieu choisi et de ses spécificités pour se questionner, en actes, sur les rapports qu'entretient l'image avec l'architecture ou les éléments naturels, et les corps de ceux qui la regardent (le public) et la font exister (les performeurs).

 

Le projet comporte ainsi certaines contraintes qui sont posées a priori comme « règles du jeu » : le choix d'un lieu, la puissance électrique relativement réduite, la nécessité de travailler à des heures tardives, voire la nuit, la mobilité des images et des supports.

 

Le choix d'un lieu : il s'agit d'investir des lieux non consacrés au cinéma, de sortir l'image de son cadre et le public de son siège. Chaque lieu choisi a ses spécificités et suggère une façon de l'habiter par l'image, menant à un travail in situ. Ainsi chaque sortie donnera in fine un objet radicalement différent, bien qu'il satisfasse aux mêmes exigences méthodologiques.

 

Une puissance électrique réduite : habiter un espace potentiellement grand invite à en ressentir la présence, à se laisser habiter soi-même par les éléments qui le constituent. Dans ce contexte, une puissance électrique relativement réduite empêche, de fait, le groupe de tomber dans le travers du grand spectacle. Il s'agit de travailler dans le minimalisme et la précision plutôt que de déployer un système colossal de son et lumière.

 

Une temporalité inhabituelle : la préparation des excursions du groupe aura lieu dans les créneaux d'enseignement ordinaires ; les sorties, en revanche, devront pouvoir se décider au pied levé, en fonction de la météo, comme on le ferait par exemple pour une sortie en mer. Il faudra parfois consacrer une bonne partie de la nuit à travailler, voire établir un bivouac sur place.

 

Un dispositif mobile : le système électrogène a été choisi léger, de façon à ce qu'il soit aisément transportable, et le plus silencieux possible. Tout est susceptible de se déplacer : les projecteurs, les écrans, les images, le public, chacun de ces éléments participant d'un dialogue et d'un déroulé scénique que le groupe se propose de découvrir collectivement.